La P’tite revue n°10 (janvier 2015)
Le mot du président : Commémorer le passé pour mieux agir dans le présent
Chers amis
L’année 2015 nous donne une nouvelle fois l’occasion de commémorer trois anniversaires importants : les 800 ans de la fondation de l’ordre des frères prêcheurs par saint Dominique (avril 1215), les 800 ans du IVe concile de Latran (novembre 1215), et les 50 ans de la levée des excommunications réciproques par le bienheureux pape Paul VI et le patriarche œcuménique Athénagoras Ier(décembre 1965).
Ce rappel historique n’est pas une complainte nostalgique car nous savons bien que l’Esprit Saint va toujours de l’avant et nous pousse à faire de même sans nostalgie mal placée. Ces commémorations sont avant tout l’occasion de prendre le temps de réfléchir sur les raisons qui ont suscité tel ou tel événement, les réponses aux problèmes, et voir ce qui peut être utile ou parfois transposable à notre époque pour mieux répondre aux difficultés et aux défis auxquels nous sommes confrontés.
– Ainsi, en son temps, l’ordre des dominicains a développé une vocation de l’apostolat et de la contemplation afin de répondre à des hérésies, dont celle albigeoise (« les cathares » ; cette hérésie considérait l’homme comme un Ange déchu et emprisonné dans la matière produite par Satan, et donc méprisable), par la prédication, une vie dépouillée proche du peuple et plus conforme aux critères de l’Évangile pour ceux qui se consacrent à une vie de pauvreté. Il faut dire que l’étalage de grands biens par des clercs ont généré ici ou là un relâchement inévitable de la foi et des mœurs, et provoqué un véritable contre-témoignage pour les opposants qu’on souhaitait convertir.
– Ainsi, le IVe concile de Latran, le plus important concile du Moyen-Âge. Afin de répondre lui aussi, mais pour l’ensemble de la catholicité, à toutes les hérésies (qui naissent d’ailleurs au sein de l’Église en raison de déviations diverses et variées) la solution a été d’expliquer plus clairement certains aspects de la foi catholique, de réformer les mœurs et la discipline du clergé, ainsi que de mettre en place une pastorale plus proche pour les fidèles. L’Eucharistie est ainsi mieux définie. La doctrine du mariage est également mieux réaffirmée. La confession auriculaire est instituée (certainement pas pour contrôler les consciences).
– Ainsi, la levée des excommunications réciproques par le pape et le patriarche de Constantinople montrant combien ils avaient conscience que le manque d’unité des disciples du Christ est un obstacle fondamental à la conversion en son Nom à laquelle est appelé le monde entier.
Aujourd’hui, notre société agit en fonction d’un individualisme exacerbé, sorte de nouvelle hérésie quasi religieuse, qui exalte la puissance et les envies égoïstes de l’homme afin qu’elles soient assouvies à tout prix, comme si le bonheur terrestre était l’ultime et la seule quête de la vie qui vaille la peine de rechercher. Par ailleurs, dans le cadre du mondialisme que nous connaissons, cette idolâtrie trouve un terreau idéal pour se développer, et elle ne se cache guère de vouloir mettre à bas le christianisme, surtout dans les pays occidentaux.
Lutter contre cette vision si pessimiste qui ne voit l’homme que par l’économie et que par son utilité, et arrêter cette déferlante, demande du temps car il est plus facile de détruire (par la démagogie et le mensonge) que de construire. Rien n’empêche toutefois de poser les fondations qui permettront de porter un fruit qui demeure au temps voulu par Dieu. De fait, l’Esprit Saint suscite ici où là des initiatives (La Manif pour Tous, Écologie humaine, etc.), comme il y a 800 ans, qui font se lever chrétiens et hommes de bonne volonté pour bâtir une société digne de ce nom. Il nous revient, par la prière et par l’action, de les soutenir car elles ont à cœur de mettre l’homme à sa vraie place, celle de créature tant aimée de Dieu, et non à celle de l’Ange déchu qui a voulu rivaliser avec Dieu en se prétendant son égal. Notre vraie liberté n’est pas de faire n’importe quoi, sinon c’est le règne du mal qui provoquera un refroidissement de la charité (v. Mt 24, 12). Notre liberté est de chercher en vérité le bien : vivre la loi évangélique qui libère l’homme de ses égoïsmes, de ses peurs, de ses tares et de ses esclavages. S’il vous plaît, ne vous laissez pas berner par la pensée dominante !
Vincent Terrenoir